Partagez sur FacebookImprimez cet article

Rencontre avec...

Bertrand Piccard ou l'aventure en héritage

L'aéronaute suisse, devenu célèbre par son tour du monde en ballon, s'investit dans le travail humanitaire et prépare une nouvelle aventure, celle de Solar Impulse. Entretien.

En mars 1999, Bertrand Piccard et Brian Jones atterrissent dans le désert égyptien à bord du Breitling Orbiter 3. Les deux aéronautes auront accompli le premier tour de la terre en ballon, en vingt-et-un jours, à la vitesse du vent (jusqu'à 234 kilomètre à l'heure !). Héritier d'une dynastye de "savanturiers", Bertrand Piccard, psychiatre de 49 ans, s'implique désormais dans une nouvelle aventure, celle de Solar Impulse, avion propulsé par l'énergie solaire, avec lequel il prévoit de faire le tour de la terre en 2011, en cinq étapes de trois à cinq jours chacune.

Bertrand Piccard, vos projets nécessitent de longues années de préparation ?

Bertrand Piccard: Sur le tour du monde en ballon, six années se sont écoulées entre le début du projet et le vol réussi. Pour mener à bien une telle entreprise, il faut 100% de réussite en matière de technologie, de météorologie, d'esprit d'équipe, de négociations politiques et de chance. S'il manque 1% dans l'un de ces cinq domaines, c'est l'échec. Un noyau de cinquante personnes travaillait en permanence sur ce projet, et environ 500 personnes ont été impliquées à un moment ou à un autre.

Nous avions une équipe extrêmement soudée, dans laquelle la remise en question était possible. Nous avons beaucoup évolué; notre troisième ballon n'avait rien à voir avec le premier. Les multiples tentatives débouchaient sur des innovations techniques. Breitling Orbiter 3 était ainsi le ballon le plus sophistiqué ayant jamais volé.

Quels ont été les moments les plus forts de votre voyage?

Bertrand Piccard: Le survol du désert du Sahara était exceptionnel. Des nuages magnifiques nous ont également accompagnés au dessus du Pacifique, changeant sans cesse de couleurs.

Orbiter 3

Vous êtes engagé dans l'action humanitaire ?

Bertrand Piccard: Je suis psychiatre. Mais je consacre une partie de mon temps à une action qui nous tient très à cœur, à Brian et moi, c'est la création de notre fondation humanitaire, "Winds of hope" (www.windsofhope.org). Les retombées médiatiques et financières de notre vol nous aident à lutter contre les souffrances oubliées qui touchent les enfants.

Vous luttez notamment contre le Noma?

Bertrand Piccard: La première action que nous avons lancé concerne en effet la lutte contre le Noma. Cette maladie absolument abominable détruit le visage des enfants. C'est uniquement une maladie de la misère, liée à la malnutrition et au manque d'hygiène. Il n'y a pas d'agent infectieux spécifique: on peut la soigner très facilement avec des antibiotiques si l'on s'y prend au tout début. L'OMS estime que cette maladie touche 100.000 nouveaux cas chaque année.

Or, elle est très rarement détectée en temps et en heure, simplement par ignorance. C'est pourquoi nous finançons au Niger la totalité du programme de prévention et de détection précoce, afin de former 2.200 spécialistes du Noma à travers le pays, presque un par village. Cette tache est aussi impossible que de faire le tour du monde en ballon. C'est pour cela qu'on s'y attèle.

Le monde vous paraissait-il fragile vu du ciel?

Bertrand Piccard: Avec cette aventure, nous recherchions une alliance avec la nature. La technologie a aujourd'hui besoin de nouer ce type d'alliance avec notre environnement. C'est pourquoi nous imaginions notre tour du monde non pas comme la dernière aventure du XXème siècle, mais plutôt comme la première véritable aventure du XXIème.

Solar Impulse

Il faut pour cela changer ses habitudes, son mode de vie et son état d'esprit. Il suffit de voir le gaspillage d'énergie. Nous percevons toujours la nature comme un réservoir dans lequel on peut aller puiser sans relâche. Or, nous ne pouvons plus continuer ainsi à détruire notre planète. Notre monde est régi par une dose d'égoïsme et de vision à court terme qui va probablement le mener à la catastrophe. Des décisions doivent être adoptées aussi au niveau politique. Je m'inquiète d'ailleurs de voir les Etats-Unis refuser de limiter leurs émissions de CO2… alors qu'ils produisent le quart de la pollution sur la planète.

Votre famille marche depuis longtemps sur les traces de Jules Vernes.

Bertrand Piccard: Jules Vernes est très présent dans toute l'histoire de ma famille. L'association Jules Vernes Aventure m'avait d'ailleurs confiée comme porte-bonheur un livre ayant appartenu à Jules Vernes. Il nous accompagnait pour la troisième tentative. J'ai emmené aussi un livre de mon grand-père (Auguste Piccard, savant ayant inspiré Hergé pour son professeur Tournesol, Ndlr)… et un couteau suisse: mon grand-père en avait un dans la stratosphère et mon père au fond des mers.

On a qualifié par le passé votre famille de dynastie de "savanturiers"!

Bertrand Piccard: Mon grand père a commencé par l'exploration stratosphérique. Il a inventé la cabine pressurisée et le ballon stratosphérique. Il est monté à 16.000 mètres d'altitude. Il s'agissait alors du premier vol dans la stratosphère. Il est le premier à avoir vu la courbe de la terre. Mon père, lui, a touché le fond de la fosse des Mariannes, l'endroit le plus profond des océans. Il y a sûrement dans notre famille une attirance pour l'exploration de nouvelles frontières, pour les périples hors des sentiers battus. Notre vol avait d'ailleurs été présenté comme la dernière grande aventure possible.

© oopartir 2010 - Propos recueillis par VM ; photos DR


En savoir plus
A voir le site solarimpulse.com


Quand et où partir

Sélectionnez un mois (+ continent et thématique en option).

Notre classement des destinations en fonction des périodes les plus favorables.

  • Retrouvez-nous sur mobile
    et tablette

youtube

Infos pratiques
Reportages
Thématiques
 
Bon à savoir
Dossiers